Un weekend en Serie A: Retour sur la 13e journée
Quel spectacle ce week-end, quel championnat nous offre le calcio. Naples conserve son fauteuil de leader, repoussant les coups de semonce d’un groupe de poursuivants version Fast and Furious. Tellement de belles choses à raconter. Ça tombe bien, ça nous épargne de devoir parler de la purge Milan vs Juventus. Retour sur la 13ème journée de Serie A.
Le fait marquant :
Naples a renoué avec la victoire après sa défaite à domicile contre l’Atalanta et le (bon) nul à San Siro lors du match pour le Scudetto face à l’Inter, juste avant la pause internationale. L’essentiel est là pour le pragmatique Antonio Conte, d’autant plus que cette victoire permet aux Napolitains de rester en tête de la Serie A. Au coup d’envoi du match face à la Roma, l’Inter, l’Atalanta et la Fiorentina étaient pourtant provisoirement passés devant.
Cela dit, ce match contre la Roma fut tout sauf une formalité. Désormais emmenés par Sir Claudio Ranieri, les Giallorossi ont livré une prestation sérieuse et courageuse, n’hésitant jamais à se projeter vers l’attaque. Et si la tête de Dovbyk ne s’était pas écrasée sur la transversale de Meret en fin de match, un nul n’aurait certainement pas été scandaleux.
Naples a toutefois globalement maîtrisé le ballon. Le jeu, sans être très brillant (ce qui devient récurrent cette saison), témoigne de la capacité d’Antonio Conte à insuffler à son groupe une force collective suffisante pour franchir ce genre d’obstacle. Lobotka, encore une fois excellent, a dirigé les opérations au milieu de terrain. Kvaratskhelia a multiplié les percées sur son côté gauche, mais sans parvenir à conclure ou à délivrer la passe décisive attendue. Lukaku, de son côté, n’a pas réussi à imposer durablement son impact physique sur la défense romaine, mais il a eu le mérite décisif de trouver l’ouverture en véritable renard des surfaces. Il a exploité une action qui avait très mal commencé pour la Roma, avec une grosse faute de placement d’Angeliño et une fin d’action tout aussi mal négociée par Svilar et Hummels. L’attaquant belge n’a pas laissé passer l’occasion de conclure.
Le reste en bref :
L'Inter n’a pas fait dans la dentelle face au pauvre Hellas Vérone (0-5). Devant son public du Bentegodi, les hommes de Zanetti n’ont absolument rien pu faire face à la déferlante nerazzurra. Marquer cinq buts en première mi-temps à l’extérieur : une performance que l’Inter n’avait plus réalisée depuis 1964, lors d’une victoire 5-1 à Marassi face à la Sampdoria. Ce match peut devenir une référence pour Simone Inzaghi dans la perspective d’une saison très longue, car il met en lumière la profondeur d’un groupe où même les remplaçants se montrent prêts à répondre présent. Que dire de Correa, sorti de nulle part, qui a livré une performance éclatante : un but (le premier en Serie A depuis deux ans) et deux passes décisives. Et Bisseck, qu’il est désormais difficile de qualifier de simple "non-titulaire".
L’expérience tactique du 4-4-2, en renonçant à la sacrosainte défense à trois, s’est révélée très intéressante. Elle pourrait bien être la clé pour mettre en valeur Frattesi, aussi brillant en Nazionale que sous-utilisé en club. Quant à Marcus Thuram, on reviendra sur sa performance individuelle plus tard.
Parler de la merveilleuse Fiorentina sans s’en étonner serait presque insultant pour les Florentins. L’esthétisme fait partie intégrante de l’histoire de la capitale toscane, et la Fiorentina est viscéralement imprégnée de cet ADN. Demandez à un tifoso viola : il vous dira toujours que l’expression de jeu et le comportement sur le terrain sont les aspects les plus importants qu’il attend de son équipe.
Cette version 2024-2025, au pays du Brunello di Montalcino, ressemble à un très bon cru. Reste à voir si elle deviendra un grand cru. Les hommes de Palladino enchaînent une septième victoire consécutive sur le terrain du promu Côme, tout en assurant le spectacle. Prestation majeure dans toutes les phases de jeu : Davide de Gea vit une nouvelle jeunesse (troisième, quatrième ? On a perdu le compte !) et enchaîne les performances dans les buts viola. La défense est imperméable, avec Comuzzo qui montre pourquoi Spalletti l’a convoqué en Nazionale, et Ranieri, impeccable, qui multiplie interceptions et relances précises. Au milieu, Adli a été monstrueux (le Milan va devoir se poser de sérieuses questions !), un véritable "Pinturicchio" moderne, maître en géométrie footballistique. Et en parlant de clubs qui doivent se remettre en question, la Juventus, avec ses deux faux 9 (voir l’instant tactique), aurait besoin comme d’un messie d’un Moise Kean à ce niveau (déjà 9 buts en 12 matches !).
Cette Serie A est passionnante. Après un tiers du championnat, quatre équipes (Inter, Atalanta, Lazio, Fiorentina) se tiennent à un petit point du leader Naples.
Impossible de conclure sans évoquer Milan – Juventus : une purge. 90 minutes de purge. On en parle d’ailleurs dans l’instant tactique comme d’une initiative totalement ratée. Voilà, c’est dit.
La perf' collective :
Septième victoire consécutive en Serie A pour l’Atalanta. Avec 28 points après 13 journées et 34 buts marqués, les hommes de Gasperini signent la meilleure performance de l’histoire du club. Encore une prestation impressionnante, cette fois sur le terrain de Parme. La première mi-temps a même frisé la perfection : une organisation parfaitement huilée et des joueurs capables d’interpréter à merveille toutes les phases de jeu. Solidarité totale, bloc compact et implacable.
Que dire des performances sur les côtés de Ruggeri et Bellanova, impeccables tout au long du match. Lookman, quant à lui, a encore livré une prestation somptueuse. Et Retegui semble inarrêtable, poursuivant sur sa lancée avec un nouveau but.
Seule ombre au tableau : Gasperini, incapable de réfréner ses contestations, a trouvé le moyen de se faire expulser malgré une performance collective exceptionnelle de son équipe.
La perf' individuelle :
Marcus Thuram a prouvé face au Hellas Vérone qu’il évolue désormais dans la cour des grands. Après un début de saison tonitruant, où il avait parfaitement compensé l’absence de buts de Lautaro, l’international français a retrouvé le chemin des filets. Et quand il marque, il ne fait pas les choses à moitié. Doublé contre le Genoa et l’Atalanta, triplé face au Torino, et un nouveau doublé à Vérone. En Europe, seul Lewandowski a fait mieux en termes de multiples (5 contre 4).
Thuram a pleinement assimilé son rôle d’attaquant axial, maîtrisant toutes les phases de jeu d’un avant-centre moderne. Mais c’est surtout dans la profondeur qu’il est exceptionnel. Si l’adversaire, comme Vérone, choisit de défendre haut, il devient tout simplement inarrêtable. Une fois lancé dans leur dos, il n’y a plus rien à faire. Placement, timing, vitesse, puissance, et qualité dans la finition : Thuram est en train de devenir tout simplement monstrueux.
L’instant tactique :
Privé de Vlahovic, blessé avec la Serbie, et sans véritable remplaçant au poste de numéro 9 en raison de l’absence prolongée de Milik depuis le début de la saison, Thiago Motta a dû réinventer l’attaque de la Juventus. La solution logique aurait été de titulariser Weah en faux 9, un rôle qu’il avait parfois occupé au centre de formation du Paris Saint-Germain, puis à Lille. D’ailleurs, cette option avait été testée lors de la deuxième mi-temps contre Naples. Mais Thiago Motta a choisi une approche bien plus audacieuse et originale.
Avec un système en 4-2-4, il a décidé d’aligner Koopmeiners et McKennie en faux 9, tout en plaçant Yildiz et Conceição sur les côtés dans des rôles plus classiques. Sur le papier, l’idée pouvait sembler ingénieuse. La patte gauche de Koopmeiners, combinée à la capacité de McKennie à attaquer la profondeur, aurait pu désorienter une défense milanaise dépourvue de repères, notamment avec Thiaw et Gabbia en charnière centrale. Mais cette stratégie ne s’est pas révélée payante.
Les deux joueurs n’ont jamais réussi à trouver la bonne position ni à établir une réelle connexion sur le terrain. Les défenseurs milanais, solides et bien organisés, n’ont pas été dupes. Malgré l’échec, on peut saluer la créativité et le courage de Thiago Motta. Cependant, il est évident que la Juventus doit rapidement retrouver Milik sur le terrain, tout en espérant que les absences répétées ou les coups de blues de Vlahovic deviennent moins fréquents. Sinon, un passage par le mercato de janvier sera impératif pour combler ce vide offensif.
Côté tribune :
À l’occasion de la journée internationale contre les violences faites au femme, l’ensemble des joueurs et entraîneurs de Serie A arborait une virgule rouge peinte sur le visage en signe de solidarité.
Moment d’intense émotion au Stadio Diego Armando Maradona avant le match Naples – Roma. Un morceau inédit du grand chanteur napolitain Pino Daniele, décédé en 2015, a été diffusé pour la toute première fois. Le stade, plongé dans un silence de cathédrale, a réagi par une incroyable ovation à la fin, marquée par de nombreux visages émus, humidifiés par une larme discrète. Vénéré à Naples, Pino Daniele est adoré par le public du stade, qui reprend à chaque match "Napule è", l’une de ses plus belles chansons.
Côté Suisse :
Yann Sommer (Inter) : petite frayeur en début de match quand le ballon a touché sa barre transversale mais pratiquement rien à faire pour lui ensuite vu que l’Inter s’est imposé 5-0 à Vérone.
Noah Okafor a vu les 90 minutes du match du Milan face à la Juventus sur le banc milanais.
Michel Aebischer et Dan Ndoye (Bologne) étaient absents face à la Lazio pour blessure.
Remo Freuler (Bologne) : l’expulsion de son coéquipier du milieu, Pobega, dès la 30ème minute, lui a bien pourri son match. Contraint de faire le double travail, il a du se contenter de défendre, non sans difficulté.
Simon Sohm : à l’instar de l’ensemble de ses coéquipiers de Parme, il n’a pratiquement pas existé, face il est vrai à une incroyable Atalanta.