Le Bayer Leverkusen est de retour
Après un exercice 2023-2024 époustouflant – invaincu en Bundesliga, vainqueur de la Coupe d'Allemagne, finaliste de la Ligue Europa –, le Bayer a eu besoin de quelques mois pour digérer. En cette fin d'année, il s'est rapproché de ses standards de la saison passée, au point d'apparaître comme le seul concurrent sérieux au Bayern pour le titre.
Ce jour-là, les joueurs du SC Fribourg n'ont pas livré un mauvais match. Leur gardien, Noah Atubolu, a stoppé un penalty ; leur meneur de jeu, Vincenzo Grifo, aurait pu marquer davantage qu'un but. Mais à l'arrivée, le Bayer Leverkusen s'est imposé 5-1, transcendé par la virtuosité de son n°10 Florian Wirtz et l'insolente efficacité de son avant-centre Patrik Schick, auteur du second quadruplé de sa carrière en Bundesliga. Les hommes de Xabi Alonso, saignants du début à la fin, ont répondu, tel un écho fidèle, au 5-1 administré la veille par le Bayern au RB Leipzig. Le message, au terme de cette dernière journée de championnat de l'année civile, est aussi clair que le symbole : le Bayer est le seul en mesure de rivaliser, cette saison sur la scène nationale, avec le géant de Bavière.
Après 15 journées sur 34, les statistiques brutes, déjà, donnent un indice net. Toutes les autres équipes de Bundesliga accusent au moins trois défaites de plus que le leader bavarois et son dauphin, qui n'en comptent qu'une chacun. L'Eintracht, 3e, est à 5 points du Bayer, de même que le RB Leipzig. Deux bonnes équipes, mais qui ne boxent pas dans la même catégorie. Même sensation pour leurs poursuivants : Mayence (25), Dortmund (25), le Werder (25), Mönchengladbach (24), Fribourg (24) et Stuttgart (23) présentent de sérieux atouts, pas au point d'apparaître comme des formations de pointe pour autant.
Invaincu à l'extérieur en 2024
Le Bayer, lui, bénéficie de la valeur inestimable de son meneur de jeu, d'une part, et du formidable élan accumulé en 2024, d'autre part. Peut-être le plus grand mérite de son entraîneur, de ce point de vue, est-il d'avoir su, après quelques semaines de flottement en octobre-novembre (nuls contre Kiel, Brême et Bochum après avoir mené dans les trois rencontres), ramener sa troupe à l'étiage de l'exceptionnelle saison passée. Le Bayer reste ainsi, à l'heure des bilans annuels, sur de sacrés records : avec 80 points pris en 2024 en Bundesliga, il devance le Bayern, qui a disputé un match en plus, de 10 unités ! Le Werkself termine l'année invaincu à l'extérieur, signe de sa solidité et de sa domination. Son portier Lukas Hradecky, absent à l'occasion de la seule défaite de l'année en championnat (contre le RB Leipzig, 2-3, à la 2e journée 2024-2025), et Robert Andrich, resté sur le banc toute la rencontre, terminent même invaincus tout court, grande rareté dans l'histoire.
Sur une série de 8 victoires consécutives, le Bayer a idéalement rebondi pour s'offrir les meilleures perspectives dans les trois compétitions dans lesquelles il est engagé : en embuscade à 4 points du Bayern en Bundesliga, favori en Coupe d'Allemagne – où il vient de sortir le Rekordmeister (1-0) – et très bien engagé pour se qualifier directement pour les 8es de finale de la Ligue des champions – où il vient de refroidir les ardeurs de l'Inter (1-0).
Xhaka à la baguette
Ces deux rencontres, de même que le récent 2-0 contre Augsbourg, illustrent sa capacité retrouvée à maîtriser le cours des évènements. Avec patience, variété, au rythme qui lui convient, en réduisant nettement les phases de jeu incontrôlées entrevues à l'automne. Le métronome suisse Granit Xhaka, meilleur joueur du match contre les Lombards comme contre les Függerstädter, n'y est pas pour rien, qui a repris la baguette de chef d'orchestre au milieu de terrain après avoir digéré le lest de l'Euro et de la gargantuesque saison passée. Les exploits printaniers du trentenaire suisse avaient entamé sa fraîcheur mentale, désormais reconstituée.
Avec seulement 5 buts encaissés sur les 8 derniers matches, le Bayer a stoppé la voie d'eau dans le domaine défensif (21 buts pris en 16 parties jusque là depuis le coup d'envoi du championnat), divisant par deux la moyenne des buts adverses par rencontre. Pour cela, il a rationalisé son contre-pressing selon les situations de jeu, évitant ainsi de trop disperser son énergie et d'augmenter le risque de se découvrir. Le bloc défensif, lui, a retrouvé de la compacité, limitant les espaces pour l'adversaire et l'invitant à l'erreur, réduisant drastiquement ses Expected goals.
Wirtz, « les superlatifs manquent »
De l'autre côté du terrain, la souplesse tactique rend le Bayer imprévisible. Avant le festival Patrik Schick contre Fribourg, Xabi Alonso avait aligné quatre onze de départ sans avant-centre. Malgré les absences – Boniface, Adli, Hofmann, notamment –, l'entraîneur basque a toujours su composer, profitant évidemment de la flexibilité hors norme de son virtuose meneur de jeu. « La valeur de Forian Wirtz est exceptionnelle pour le football allemand », a asséné lundi dernier le commentateur vedette de Sky, Wolff Fuss, dans son émission de débrief Glanzparade. « Ce garçon laisse presque sans voix. Avec lui, les superlatifs manquent », s'est-il réjoui. « Wirtz partira au Real Madrid avec Xabi Alonso en 2026 », a prophétisé dans la foulée son compère Frank Buschmann. Combien de titres auront-ils remporté d'ici là ? Et le Bayern est-il d'accord ?