Chez les gardiens, la Mannschaft a la parade
Tandis qu'elle doit gérer l'après-Neuer, la sélection allemande prépare déjà le coup d'après en couvant le jeune prodige de Cologne Jonas Urbig.
5 mars 2008. Dans les buts de Schalke, infranchissable, Manuel Neuer, dans un one-man-show monumental, éteint le FC Porto à lui tout seul. 30 juin 2014. Révolutionnant le poste de gardien de but, le même Neuer désespère l'Algérie, qu'il élimine en huitième de finale du Mondial. Avec “Manu”, après Sepp Maier, Harald Schumacher ou Oliver Kahn, l'Allemagne prouve alors, une fois encore, qu'elle est la nation des gardiens par excellence. Une décennie plus tard, le portier du Bayern annonce son retrait de la sélection et, dans la foulée, son éternel second, l'impeccable gardien du Barça Marc-André ter Stegen, se blesse gravement au genou. Saison terminée. Exit le n°1, exit le n°2, la Mannschaft se retrouve face au vide et beaucoup ont le vertige, redoutant qu'elle dévisse dans ce secteur où elle a toujours fait autorité.
Alors que se profilent les rencontres de Ligue des Nations (ce 11 octobre en Bosnie puis le 14 contre les Pays-Bas), qui est, désormais, le gardien de l'équipe d'Allemagne ? Le n°3, Kevin Trapp, est blessé lui aussi. Le n°4, Bernd Leno, s'est mis hors champ de lui-même. Le sélectionneur Julian Nagelsmann a donc ouvert la porte à deux prétendants : Alexander Nübel, gardien de Stuttgart, prêté par le Bayern (28 ans), et Oliver Baumann, celui d'Hoffenheim (34 ans). Les deux devraient avoir droit à du temps de jeu en ce début d'automne. Chacun affiche autant de grosses qualités que de petits défauts, dans des profils assez différents. Redoutable sur penalty, impressionnant sur sa ligne, le plus âgé des deux compte en Andreas Kronenberg, l'entraîneur des gardiens de la sélection, un avocat de poids. Mais le cadet, programmé comme successeur de Neuer tant en club – le Bayern l'a déjà prêté à plusieurs reprises pour le garder au chaud – qu'en Nationalmannschaft, s'inscrit sur du plus long terme. Et après ?
N°1 avant même le début de saison
Après, ce sera l'heure pour Cologne de prendre sa revanche. Si l'excellent Timo Horn, barré par la hiérarchie, n'a jamais eu sa chance avec l'équipe nationale, sinon comme vice-champion olympique en 2016, un poupon commence à sérieusement éclabousser au bord du Rhin : Jonas Urbig, 21 ans. Portier de l'équipe nationale depuis les moins de 17 ans, en 2017, il est déjà réclamé chez les grands dans les divers sondages menés sur le sujet. Concurrencé par Noah Atubolu – couvé par Christian Streich à Fribourg, ce dernier a été maintenu à son poste cette saison par son successeur Julian Schuster –, Urbig est déjà sur les radars du sélectionneur des A. Né à Euskirchen, dans l'extrême ouest de l'Allemagne, le jeune gardien d'1,89 m, formé à Cologne, ne sort pas de nulle part. Cela fait trois saisons, déjà, qu'il sévit comme titulaire en deuxième division : en prêt, d'abord, à Regensburg puis à Fürth, et dans son club, cette année. C'est dans le nord de la Bavière qu'il s'est affirmé comme meilleur gardien du championnat, la saison passée.
Résultat : avant même que l'exercice 2024-2025 ne débute, le FC Cologne le désignait n°1, au nez et à la barbe d'un sacré client, pourtant, Marvin Schwäbe. L'an dernier, déjà, le Bayern avait jeté un œil sur la destinée du jeune prodige. Avait discuté, sans concrétiser. Avec un contrat jusqu'en 2026, Urbig se trouvera, l'été prochain, face à un choix : prolonger dans son club de toujours ou s'engager ailleurs. Ce qui, clairement, place Cologne, s'il veut conserver son joyau, face au défi d'une accession en première division.
Heide, héros des U17
Urbig est un gardien complet, dont la panoplie rappelle celle de Neuer au même âge : zélé dans le travail, fort sur sa ligne, dominateur dans sa surface, ambidextre, très bon au pied et dans la relance longue, peu stressé et plutôt culotté. Dans son sillage, un échelon en dessous, un champion du monde des moins de 17 ans brille déjà avec Unterhaching. En 2023, Konstantin Heide avait en effet apporté un écot décisif, en demie et en finale, au titre des jeunes Allemands. À 18 ans désormais, il se balade déjà avec l'étiquette de héros, même s'il n'en est pas encore à jouer la montée avec le club de la banlieue de Munich. En attendant que s'affirment ces jeunes talents, le sélectionneur peut prendre son temps. Faire des essais et laisser jouer la concurrence entre les trentenaires qui n'ont jamais eu leur chance, tels Baumann ou Ortega, qui revendique le statut de n°1 à Manchester City. « Le choix s'est franchement rétréci », affirmait fin septembre Uli Stein, ancien gardien de la Mannschaft, dans les colonnes du bi-hebdomadaire kicker. Il n'y a, c'est vrai, qu'un seul Manuel Neuer...