Et si le Real Madrid faisait exploser Arsenal au Bernabéu ?
Notre expert Sacha Tavolieri vous explique pourquoi Arsenal peut encore vivre l'enfer merengue à l'occasion de ce quart de finale retour au stade Santiago-Bernabéu.
Écrire l’histoire
Voilà le défi auquel fait face le club le plus titré d’Europe. Face aux Gunners d’Arsenal, les Merengues peuvent rendre possible l’impossible. Confronté au plus grand défi de sa saison, le Real Madrid peut concrétiser les rêves, les espoirs fous et les prières de ses plus fervents supporters. Dans le stade Santiago Bernabéu règne une atmosphère magique, couplée à une électricité latente. Ce mercredi, il ne sera question que de cela. Une revanche sur le football, sur l’honneur, sur une saison complexe où les égos sont venus parasiter la quiétude de l’année dernière, quand chaque star respectait l’espace de l’autre pour permettre à la liberté de chacun d’exister. En 2025, celle des uns ne s’arrête plus là où commence celle des autres… ce qui constitue un problème existentiel en football. Le temps des 90 minutes (et plus si affinités), le Real va devoir faire fi des habituelles considérations territoriales qui enveniment le vivre-ensemble madrilène pour inscrire la soirée du 16 avril dans l’histoire des plus belles nuits européennes du club, quinze fois vainqueur de la Coupe aux Grandes Oreilles.
Alors, comment Arsenal peut-il encore tout perdre ?
Pablo Gallego, à Madrid pour Le Journal du Real et spécialiste du club espagnol, répond par l’affirmative : « Malgré l’image donnée d’un collectif qui baisse les bras à l’Emirates Stadium — ce à quoi ils ne nous ont jamais habitués en Europe — le Real Madrid est un club qui, historiquement, possède dans son ADN une réelle capacité à réagir dans les moments les plus difficiles. Cela a toujours été comme ça, et les deux dernières campagnes européennes remportées par les Madrilènes le prouvent. Il faudra une vraie Remontada, la vraie, celle où tu as perdu sur un large score au match aller et qui te demande un miracle au retour. Tout cela prend racine au milieu des années 80, lorsqu’Emilio Butragueño était le patron de cette “Quinta del Buitre”, composée de cinq jeunes prodiges formés à l’étiquette Real Madrid, et des confrontations épiques où nous perdions en Coupe de l’UEFA face au Borussia Mönchengladbach ou au Bayern Munich, et qu’au match retour, nous faisions appel à “l’espíritu de la remontada” apporté par feu Juanito, l’éternel numéro 7 tué dans un accident de voiture. D’un point de vue spirituel, les historiens du club disent que derrière chaque remontée historique se cache l’âme de Juanito. »
À l’esprit doit toujours s’attacher la lettre, et les Madrilènes se trouvent aujourd’hui face à l’obligation d’élever leur niveau de jeu pour espérer l’exploit : « J’ai eu des indiscrétions qui me confirment que le groupe ne soutient plus Carlo Ancelotti, et le coach italien le sent », nous confie Pablo Gallego, qui précise que le secteur défensif est celui qui l’inquiète le plus.
Pour Edgar Groleau, correspondant dans la capitale espagnole pour RMC, actif notamment dans la célèbre émission L’After Foot en France : « Le retour d’Aurélien Tchouaméni peut vraiment faire la différence pour le Real Madrid. D’un point de vue athlétique, il apporte beaucoup au Real. C’est l’un des joueurs les plus importants car il récupère énormément de ballons, mais il est aussi utile dans leur utilisation. Ce manque d’intensité a pénalisé le Real au match aller. Luka Modric et Eduardo Camavinga (suspendu pour ce match) ont souffert car ils ont été dépassés par le milieu de terrain d’Arsenal qui, sur le papier, était nettement supérieur. Ancelotti a l’option Federico Valverde dans le cœur du jeu, ce qui peut aider à combler le déficit d’impact dont ils ont été victimes à Londres. »
Puisqu’il faudra marquer au moins trois fois, la forme des attaquants madrilènes sera primordiale, avec comme point culminant de l’histoire un duel épique entre les Bondynois Kylian Mbappé et William Saliba. Alors que le défenseur des Gunners avait affiché une nette supériorité au match aller, le buteur du Real s’est encore montré trop maladroit dans la surface de réparation, ce que confirme Edgar Grelau : « Ancelotti va devoir trouver une façon de mieux exploiter Vinicius et Rodrygo afin de mettre Kylian Mbappé dans de meilleures conditions. Pour réussir cela, il faudra mieux utiliser Jude Bellingham, dont le jeu était trop défensif à l’aller. Ceci dit, il y aura une part de risque : s’il remet Fran García et Lucas Vázquez, cela libérera des espaces dans leur dos… »
Malgré cette nécessité d’attaquer, le Real Madrid devra garder l’équilibre : « Le Real Madrid peut marquer trois buts en 10 minutes. S’ils sont dans le coup, ils devront rester dans le match le plus longtemps possible. Je ne pense pas qu’ils aient forcément besoin de marquer tôt, mais ils devront mieux exploiter leurs forces. En un claquement de doigts, ce collectif peut revenir à son meilleur niveau. La deuxième mi-temps face au Borussia Dortmund l’a prouvé, et lorsqu’ils jouent de la sorte, il s’agit de l’une des meilleures équipes du monde. »
Journaliste pour The Guardian et spécialiste d’Arsenal, Philippe Auclair n’a pas peur du match retour, même s’il confie une part d’appréhension : « Il y aura toujours ce petit moment de crainte avant d’entamer la rencontre, parce qu’Arsenal a parfois des moments d’absence. Mais, vu la configuration du match, Mikel Arteta aura parfaitement préparé ses patrons pour l’événement. L’essentiel est fait, même si les Gunners devront faire le dos rond pendant les quinze premières minutes… Il faut à tout prix éviter de voir les Merengues marquer d’entrée, et ensuite devoir souffrir pendant les quatre-vingt minutes restantes… Mais très honnêtement, vu la solidité défensive d’Arsenal, vu ce qu’ils ont montré au match aller, je suis confiant. »
Pour créer l’exploit, le Real Madrid doit instiller le doute dans la tête de l’adversaire, se connecter au public dès l’hymne de la Ligue des champions, et faire exploser les certitudes d’Arsenal afin d’envahir leurs esprits. Transformer ce stade renfermé du Santiago Bernabéu en un théâtre d’euphorie rendrait la nuit du 16 avril aussi magique que celles des plus grandes conquêtes de l’histoire de l’Empire de la Casa Blanca…